Pig Boy 1986-2358 – Gwendoline Soublin

Titre : Pig Boy 1986-2358

Auteur : Gwendoline Soublin

Note : 17/20

Editeur : Espaces 34

Genre : théâtre

Sous-genre(s) : science-fiction // satire // expérimental

Mise en situation : Nous assistons à trois courtes pièces qui, en quelques sortes, se suivent. Ou bien sont résultantes des autres. Dans la première pièce, nous suivons un jeune fermier qui s’occupe d’un élevage de cochons mais qui fait face à la crise. Dans la seconde pièce, nous assistons à un procès intenté contre un cochon se comportant comme un humain, égérie d’une grande marque de charcuterie, accusé d’agression sexuelle. Dans la dernière pièce, nous visualisons la fuite d’une truie enceinte de bébés hybrides entre l’humain et le porcin.

Critique :

J’ai dû lire cet ensemble de pièces pour un cours universitaire, afin d’étudier la littérature du 21e siècle, et je crois en avoir eu un bon aperçu. Tout, dans ces pièces de Gwendoline Soublin, inspire la modernité, et elles soulèvent des problèmes bien présents dans notre société. La première pièce suit un fermier qui « rame à joindre les deux bouts », comme on dit, car c’est la crise économique et la crise des agriculteurs/fermiers – contexte on ne peut plus actuel – ; nous le suivons de telle sorte à ce que toutes ses actions, tous ses choix, soient décryptés sous forme de choix multiples dont nous-mêmes sommes détenteurs de l’issue. Toujours une balance entre la sureté qui passe pour de la lâcheté, et la bravoure qui reflète les choix trop ambitieux. La seconde pièce nous place comme spectateurs d’un étrange procès contre un porc – entre adoration et détestation, les avis divergent au sein d’une typographie et d’une mise en page on ne peut plus bizarroïde. La dernière pièce, enfin, stellaire, lunaire, forestière, emmène une truie enceinte dans une course poursuite subie à cause d’humains. Elle est enceinte de bébés-humains, mais elle veut se rebeller contre son destin, se rebeller contre ces centenaires de maltraitance animale et porcine. Dans Pig Boy, il est d’ordre naturel et animal que la proximité se fasse avec le lecteur : tout est mis en œuvre pour nous assimiler avec les personnages principaux, nous sommes comme forcés de nous reconnaitre en eux, car nous sommes eux. Nous sommes d’une certaine façon le fermier. Nous sommes d’une certaine façon le public de ce procès. Nous sommes d’une certaine façon les bébés de cette truie. Cette approche immersive est foncièrement intéressante car force quelque peu l’idée et l’affect que l’on pourrait tirer de cette pièce, par des lecteurs qui ne sont peut-être forcément affilié et connaisseur de la maltraitance animale, ou encore face à une sorte d’empathie animalière qui serait pour beaucoup inconnue. J’ai trouvé ces moyens grandioses, et la mise en page spectaculaire. J’ai eu l’occasion d’aller voir une représentation de cette pièce et j’en suis sorti absolument émerveillé devant tant d’ingéniosité qui rendait si bien hommage au texte d’origine.

Cette pièce est complètement difforme, un ovni sorti de nulle part. Par une mise en page grotesque qui susciterait presque de la peur, et une pluralité narrative, l’auteure nous plonge dans un contexte empathique pro-animalier, pro-porcin, pro-vie, au final. Une pièce à choix, une pièce-procès, une pièce-tombante. Les moyens sont bons pour narrer une histoire parfaitement maitrisée, et belle.

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