Savannah Bay – Marguerite Duras

Titre : Savannah Bay

Auteure : Marguerite Duras

Editeur : Les Editions de Minuit

Nombre de pages : 135

Date de parution : 1982

4ème de couverture : Tu ne sais plus qui tu es, qui tu as été, tu sais que tu as joué, tu ne sais plus ce que tu as joué, ce que tu joues, tu joues, tu sais que tu dois jouer, tu ne sais plus quoi, tu joues. Ni quels sont tes rôles, ni quels sont tes enfants vivants ou morts. Ni quels sont les lieux, les scènes, les capitales, les continents où tu as crié la passion des amants. Sauf que la salle a payé et qu’on lui doit le spectacle. Tu es la comédienne de théâtre, la splendeur de l’âge du monde, son accomplissement, l’immensité de sa dernière délivrance. Tu as tout oublié sauf Savannah, Savannah Bay. Savannah Bay c’est toi.

Critique :

Un nouveau livre de Marguerite Duras sur ce site ! Oui je sais, l’article posté avant celui-ci était également sur un livre de Duras (Détruire Dit-Elle), mais à contrario du précédent : celui-ci est une pièce de théâtre ! La première pièce de Duras que je lis, et je trouve ça bien car je peux à présent avoir un aperçu de son art dans plusieurs genres littéraires ! Mais promis, le prochain article ne sera pas sur un livre de Duras, je vais faire durer le plaisir et attendre avant d’en lire de nouveaux.

Ce livre est une pièce de théâtre dans laquelle nous allons suivre un dialogue entre deux personnages : une jeune femme (elle n’a pas de prénom) et une vieille dame (Madeleine). Elles vont tourner leur discussion autour d’un principal sujet : ce qui s’est passé à Savannah Bay des années auparavant.

Ce livre, dont la couverture est affichée en haut de l’article, est une version augmentée de l’œuvre de Savannah Bay. Elle comporte en réalité deux pièces de théâtre. Distinctes, mais similaires. La première est une pièce de théâtre écrite par Marguerite Duras, le manuscrit original de Savannah Bay. L’autre pièce, représentant le dernier tiers du livre, est le script de la pièce mise en scène par Marguerite Duras, jouée en 1983. Ainsi nous avons une seconde pièce remaniée et réadaptée pour la scène. Elles sont similaires car la plupart du texte de la seconde pièce est contenu dans la première, ainsi nous ne découvrons rien de nouveau – du moins, d’un premier abord. Mais les pièces sont distinctes car la première est faite pour être lue : les didascalies contiennent des distinctions et des précisions invisibles à représenter, elles sont poétiques et complètement issues des descriptions que l’on pourrait avoir d’un roman.

Un aspect que je juge d’important dans cette pièce : le personnage de Madeleine est atteint de pertes de mémoire ; elle semble redécouvrir sa vie à mesure qu’elle la raconte à la jeune femme, sans que l’on puisse savoir si elle refuse de se souvenir ou si elle en est incapable. du fait de cette mémoire défaillante, le récit est essentiellement constitué de retours en arrière, de corrections et de reprises.

Il y a beaucoup d’indicible dans cette pièce. Les paroles prononcées ne sont jamais réellement déterminantes. L’auteure nous laisse des portes ouvertes, des indices ; mais c’est à nous de trouver ces indices pour essayer des les démêler du vrai et du faux, d’essayer de les comprendre pour réellement comprendre ce qu’il s’est passé à Savannah Bay.

Savannah Bay, qu’est-ce ? Est-ce une histoire d’amour fou, au milieu des eaux ? Ou serait-ce une histoire entravée par la mort sur des galets ?

J’ai apprécié cette œuvre. J’ai apprécié mais je n’ai pas retrouvé mon enthousiasme que j’ai eu lors de mes lectures de Moderato Cantabile et Détruire Dit-Elle. Je pense préférer Marguerite Duras et ses romans, plutôt que ses pièces de théâtre. Mais je ne peux me fermer après en avoir lu qu’une seule ! Je continuerai ma quête de la lecture de ses écrits, et pièces inclues !

Passage :

« MADELEINE (étonnée) : Tiens… C’est possible… (Temps). C’est curieux… c’est vrai ce que tu dis, qu’elle est là, (geste, elle montre l’endroit), tu ne trouves pas ? (Temps). Elle s’est tuée cette chanteuse-là ?

JEUNE FEMME (hésitation) : Oui.

MADELEINE : Ca ne m’étonne pas. (Temps). On devine à travers la force de sa voix, on devine une autre force…

JEUNE FEMME : La mort…

MADELEINE : Peut-être, oui. (Temps). La mort. (Temps). Je saurais comment vouloir. Pendant des mois il m’est arrivé de mourir chaque fois au théâtre. (Temps). C’était à l’époque d’une très grande douleur. Quoi que j’aie joué pendant tout ce temps cette douleur s’introduisait dans le rôle, elle jouait, elle aussi, elle me montrait comment on pouvait jouer de tout, même de ça, de cette douleur-là pourtant si terrible.

                            Silence. Douceur.

JEUNE FEMME : Tu te souviens ?

MADELEINE (mensonge) : Non.

JEUNE FEMME : Tu mens.

MADELEINE : Oui. (Temps). Comment saurais-tu, toi, ces choses tu es si petite.

JEUNE FEMME : Je les sais par toi. Et je les sais aussi déjà de mon côté. Tu m’as dit : la douleur se propose comme une solution à la douleur, comme un deuxième amour. »

3 commentaires sur « Savannah Bay – Marguerite Duras »

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